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Donnez vous les moyens de devenir ce que vous voulez être – Guillaume Richard co-fondateur de O2

Sachez ce que vous voulez être, ce que vous voulez faire, puis donnez vous les moyens pour atteindre vos objectifs.

C’est le conseil que j’ai retenu de l’interview que j’ai réalisée de Guillaume Richard, le dirigeant co-fondateur de la société O2.

O2 est une PME spécialisée dans les services à la personne (ménage, garde d’enfants et aide aux seniors). En fait, il s’agit d’une très grande PME car O2 est l’entreprise qui a créé le plus d’emplois en France depuis 2004 (une moyenne de plus de 1000 emplois nets créés par an depuis cette date d’après cet article).

Vous comprenez donc mon enthousiasme et ma fierté d’avoir pu interviewer l’un des entrepreneurs les plus importants pour la France ! Je le remercie encore pour le temps qu’il m’a accordé.

Pour information, O2 sera présent au salon des services à la personne qui aura lieu les 5, 6 et 7 décembre 2013 au Palais des Congrès de la Porte de Versailles de Paris.

Guillaume Richard : une envie d’entreprendre depuis le collège

A 13 ans, Guillaume Richard a trouvé sa vocation : il créera son entreprise quand il sera plus grand. Assez rare pour un jeune de rêver de devenir entrepreneur.

C’est un livre qui lui a créé cette vocation : Le Roi Vert de Paul-Loup Sulitzer.

le roi vert

C’est à travers cette lecture qu’il comprit comment il allait essayer de changer le monde. Ce n’est pas pour l’argent ou pour la gloire qu’il voulait le faire (même s’il pense que « les entrepreneurs sont tous un peu mégalo »). C’est parce que pour lui créer une entreprise :

  • c’était utile
  • ça avait du sens
  • c’était épanouissant

Aujourd’hui, on peut dire qu’il a réalisé son rêve d’enfant.

Pour réaliser son rêve, il entreprend des études en école de commerce (EDHEC), mais commence sa vie professionnelle en tant que contrôleur de gestion à la Française des Jeux. Il restera en poste pendant 3 ans avant de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale.

De salarié à startuper

En 1999, il pris la décision de sauter le pas vers l’accomplissement de son rêve en créant une startup Internet avec un associé. C’est alors que « At home » est née : une plateforme internet permettant aux utilisateurs de trouver un professionnel dans les services à domicile. Il s’agissait alors d’une plate-forme de mise en relation.

Or, Guillaume Richard souhaitait aller plus loin en faisant un vrai pont entre l’économie digitale et l’économie réelle. C’est de cette manière qu’il s’est rapproché de l’entreprise Unipôles qui proposait des services à domicile. Une nouvelle activité « Click and Mortar » (une entreprise ayant à la fois une activité web et une activité présentielle) prendra forme de cette fusion. Le 15 avril 2000, O2 est née, une entreprise de conception et de distribution de services à domicile.

Comme toute startup digne de ce nom, O2 avait pour vocation à lever des fonds. Ce qui était extrêmement facile à l’époque de la bulle Internet, qui avait éclatée le 14 avril 2000, soit la veille du lancement de O2.

Mince, voici la première difficulté se dressant devant cet entrepreneur. Mais les associés (ils sont 3) ne se laissent pas décourager et vont tout de même approcher des business angels… sans succès.

Ils devront « se contenter » d’un prix de 150 000 FF obtenu grâce à Vivendi. Un beau moyen de se lancer malgré le contexte difficile de l’époque.

De startuper à salarié et startuper

L’aventure de O2 continue, mais Guillaume Richard préfère avoir un emploi salarié à côté de son activité d’entrepreneur. Il travaillera ainsi de 2011 à 2004 dans une entreprise dans la presse en tant que cadre supérieur (il managera des équipes pour la distribution de la presse dans des points de relais).

C’est alors qu’il est cadre supérieur de 8h à 20h et entrepreneur à partir de 20h et les weekends.

O2 est à ce moment une entreprise de service spécialisée dans la garde d’enfants et dans le ménage.

Son aventure connaitra un tournant majeur suite à une grande décision qu’il aura prise.

De startuper à dirigeant

En 2005, O2 possédait 5 agences. Le chiffre d’affaires d’O2 s’élève alors à 790 000 euros fin 2004 et passe à 2,2 millions fin 2005.

Pour passer à la vitesse supérieure, Guillaume Richard et ses associés ont réussi à lever 140 000 euros de « love money » (famille, amis, amis des amis, …). Ce qui leur a permis d’obtenir un crédit à la banque de 125 000 euros.

Suite à cela, les choses ce sont mises à accélérer. En 2006, c’est alors 20 agences qui composent leur réseau (pas de franchises, leurs propres agences). Puis fin 2006, ils réalisent une grosse levée de fonds avec 1,5 millions d’euros en capital et 1,5 millions en emprunt bancaire.

Cette accélération vient d’une prise de décision très forte (« le déclic » selon les termes de Guillaume Richard) : celle de devenir le numéro 1 du secteur. C’est à partir de ce moment qu’ils ont mis les moyens de remplir leur objectif.

2007, 65 nouvelles agences ouvrent leurs portes en 8 mois. A la fin de l’année, O2 possède 120 agences dans toute la France (ils en sont à 12,5 millions de CA avec 2000 employés).

En 2008, ils développent un process qualité débouchant sur une certification.

2009, ils ouvrent leur activité au secteur des seniors. En 2012/2013 c’est le début de l’aventure en franchises.

Depuis Guillaume Richard est devenu un dirigeant d’entreprise, et son métier n’a aujourd’hui plus rien à voir avec ses débuts d’entrepreneur.

En tant qu’entrepreneur il devait construire une entreprise pérenne.

En tant que dirigeant, il doit savoir s’entourer des meilleurs salariés pour que l’entreprise soit la meilleure possible et reste numéro 1.

C’est un enjeu important, surtout dans le secteur du service à la personne car ce travail est « dur physiquement avec le ménage, mais dur aussi psychologiquement avec les enfants et les seniors ». Guillaume Richard continue :

« Quand vous gardez des enfants, vous devez être constamment en alerte, toujours attentif à ce qu’il se passe. C’est épuisant intellectuellement. Lorsque vous travaillez avec des personnes âgées, c’est parfois difficile car vous faites souvent face à la dépendance et à la mort. C’est pour cette raison que nous avons mis en place des dispositifs pour rendre le travail moins pénible avec un plan de carrière attractif et un process dans une journée de travail varié. Afin de réduire la pénibilité du travail, nous proposons aux employés de commencer leur journée avec les seniors, de continuer ensuite avec du ménage et enfin de terminer avec les enfants afin d’avoir une journée équilibrée. »

Comme vous me connaissez, vous vous doutez bien que je n’ai pas pu m’empêcher de poser cette question :

« Vos métiers demandent d’utiliser de nombreuses soft skills, surtout en matière de relations interpersonnelles. Est-ce le coeur de votre processus de recrutement ?« 

Voici sa réponse : Il ne faut pas résumer ce métier au savoir être. Si le savoir-être est important, ce n’est pas LE plus important. Dans le secteur des services à la personne, le savoir-faire est extrêmement important sinon vous vous exposez à des dangers. Nos employés sont formés et suivis pour avoir des méthodes précises en matière de garde d’enfants, pour qu’ils aient des outils à utiliser en cas de besoin. Voici une anecdote que j’ai vécue personnellement pour illustrer mes propos :

Alors que j’habitais encore à Paris et que nous n’avions pas encore développé l’activité de garde d’enfants, j’ai fait garder ma petite fille après la crèche par une jeune femme très douée au niveau relationnel. Mais elle n’était pas formée et je n’ai pas fait attention à cela. Mais un jour je reviens du travail et rentre chez moi. Je demande à la jeune femme comment allait ma fille. Elle me dit que ça va, mais qu’elle avait froid car elle grelotait et qu’elle l’a alors très bien couverte. Alors je lui demande si elle grelotait parce qu’elle avait froid ou parce qu’elle avait de la fièvre ? Elle me répond qu’elle ne sait pas. Je vais donc voir ma fille et elle était brulante. Je l’emmène aux urgences : 41,3 degré de fièvre. Heureusement que tout c’est bien terminé, mais cela aurait pu être dramatique. J’ai plein d’autres anecdotes de ce type pour vous montrer que dans ce secteur, le savoir-faire est primordial. On ne peut pas résumer ce métier à du savoir-être et à des compétences relationnelles. Il y a un vrai savoir faire et de vraies compétences professionnelles derrière. »

Même les connaissances théoriques ne sont pas suffisantes. La preuve, dans l’émission Patron Incognito (Undercover Boss) dans laquelle il est passé.

Je ne sais pas si vous vous rappelez de cette émission, mais j’ai pu interviewer Jean-Claude Puerto également par rapport à cette émission.

Un passage sur M6 dans « Patron Incognito »

Pour illustrer l’importance du savoir-faire dans ce métier, voici un aperçu de ce qu’a vécu Guillaume Richard en se faisant passer pour un employer lambda dans sa propre société.

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Même si sa connaissance théorique est très poussée (c’est lui qui a créé la plupart des process dans sa société), il avait visiblement du mal à suivre ses employés sur le terrain.

Pour recruter les meilleurs employés, ils réalisent des entretiens à partir de QCM, de tests, de mises en situation afin de vérifier le savoir-faire des personnes (même s’ils font des formations après).

Le conseil de Guillaume Richard pour les entrepreneurs

Son énorme conseil c’est de savoir ce que vous voulez faire et ce que vous voulez être.

Si vous voulez être le numéro 1, il faut aussi vous donner les moyens d’y arriver. Il faut une bonne adéquation entre l’objectif que vous vous êtes fixé, et les moyens que vous mettez pour y arriver.

Guillaume Richard dit : « nous n’avons pas hésité à ouvrir le capital et à embaucher des personnes meilleures que nous. Ca c’est super important, de savoir s’entourer de personnes qui ont des compétences plus importantes que vous. Pour nous développer nous avons chercher des compétences. Tout ça parce que nous avons décidé d’être le 1er sur le marché. »

« Le premier frein au développement d’une entreprise c’est l’entrepreneur lui même. Car c’est compliqué d’être à la fois la bonne personne quand on est seul, puis quand on est à 2, puis quand vous êtes à 100, 1000, … Vous passez de l’homme d’orchestre au chef d’orchestre. Il faut en avoir les capacités et en avoir le goût. »

« L’une des questions à se poser, c’est donc de savoir si vous voulez une grosse entreprise ou non. Car le problème en France c’est que quand vous êtes petit, on vous aide beaucoup. Quand vous êtes très gros, vous pouvez vous organiser pour éviter les problèmes, mais quand vous êtes au milieu, alors on ne vous aide pas et vous ne pouvez pas éviter les problèmes. »

« Au départ il faut déterminer ce que vous voulez être et en fonction de cela vous pouvez choisir le bon statut, le bon projet. Pur que tout se passe bien, le projet, les moyens et l’entrepreneur doivent être alignés. Donc quels sont vos objectifs, comment vous voyez-vous dans 20 ans ?« .

Si vous ne vous fixez pas de but, ce sera compliqué de l’atteindre

« Il faut se fixer un objectif, que son choix d’entreprendre a du sens, car décider d’être entrepreneur c’est beaucoup de sacrifices :

  • beaucoup de temps investi avec un retour sur investissement qui peut arriver très tard
  • un manque à gagner certain lorsque vous choisissez de créer votre boîte plutôt que de faire carrière dans une grande entreprise avec un bon salaire garanti »

Ce que je retiens de cette interview de Guillaume Richard en quelques mots

  • Définissez avant de faire des choix importants ce que vous voulez être (dirigeant ou entrepreneur ?)
  • Définissez un objectif clair et donnez vous les moyens de l’atteindre
  • Entourez-vous de personnes meilleures que vous pour avancer plus loin

Par Jérôme HOARAU

Jérôme Hoarau est conférencier en soft skills (Jerome-Hoarau.com) et est co-organisateur du championnat de France officiel de Lecture Rapide et de Mind Mapping. Il a obtenu plusieurs titres de sport du cerveau tels que :
- Champion du monde de Mind Mapping 2018
- Champion du Royaume-Uni de Mind Mapping 2019
- Vice-champion du Royaume-Uni en Lecture Rapide 2019
Il est le co-auteur des livres "Les Gentils aussi méritent de réussir" (Alisio) et de "Soft Skills (Dunod). Il a également co-fondé le site PassiondApprendre.com.

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